Bienvenue dans un quartier pas tout à fait comme les autres. Ici, au début des années 1920, se côtoient des familles hors du commun.
En 1921, la famille Vian s’installe dans un hôtel particulier au n° 33, Les Fauvettes. Paul Vian, le père de Boris, vit confortablement grâce à un héritage familial. Un an plus tard, en 1922, son voisin au n° 29, à la Ville Le Lys rouge, n’est autre que Jean Rostand, le fils de la poétesse Rosmonde Gérard et d’Edmond Rostand, le célèbre auteur de Cyrano de Bergerac. Jean Rostand fut un brillant biologiste, naturaliste et humaniste, historien des sciences et membre de l’Académie française. Il vivra ici pendant 55 ans. Il y installe un laboratoire dans sa cave, où il poursuivra ses recherches pionnières en biologie et en génétique, contribuant à faire avancer cette science de façon remarquable.
La crise de 1929 bouleverse l’équilibre de la famille Vian. Ruinés, ceux-ci louent alors leur maison à la famille du future jeune prodige du violon, Yehudi Menuhin. Quant à la famille de Boris Vian, elle s’installe plus modestement dans la maison du gardien, à l’entrée de la propriété.
C’est dans ce cadre à la fois bourgeois, bohème et intellectuel que grandit Boris Vian. Il vit ses jeunes années dans un univers d’une rare créativité, partagé entre la maison familiale, le jardin et la fameuse « salle de bal » construite de bric et de broc. Ce lieu, véritable cabane des merveilles, accueille des parties de jeux d’échecs, des fêtes costumées, des pièces de théâtre improvisées et d’incessantes expériences artistiques. On y rit, on y danse, on y débat, on y rêve.
Boris, esprit vif et curieux, développe très tôt un goût prononcé pour les arts, les mots et les sons. Il apprend la trompette en autodidacte, la trompinette – comme il l’appellera – et, adolescent, forme un groupe de jazz avec des amis, dont le clarinettiste Claude Abadie du même âge que lui. Ce sera le début de sa passion pour le jazz ; passion qui ne le quittera jamais.
Boris Vian n’est pas que musicien. Ingénieur de formation, il sera tour à tour romancier, poète, parolier, traducteur, critique, dramaturge et acteur. Il fréquentait assidûment la bibliothèque très riche de son voisin Jean Rostand et écrivit des œuvres remarquées ou même provocatrices. Dans ses romans, comme L'Écume des jours, il mêle tendresse, humour noir et poésie absurde avec une inventivité inimitable. Et cette imagination, il l’a sans doute cultivée dès l’enfance, ici, à Ville-d’Avray, dans ce petit monde d’amitiés farfelues et de liberté totale.
En hommage à l’œuvre de Boris Vian, la commune a choisi de baptiser le passage où se situe aujourd’hui le Théâtre – Cinéma Le Colombier, du nom de Passage de L’Écume des jours.

Texte : Dominique Claudius-Petit - les Amis du musée
Comédien : Boris de Mourzitch
Dessin de Seb James